03.01.2008
Jours tranquilles à Bruxelles
Poursuivons le compte à rebours avec Art en marge puisque c’est à son programme que j’ai emprunté la nouvelle de l’exposition PLNY à l’horizon Montreuil 2009.
Auparavant, ce Lubos P..Y (mais qui nous dira comment ça se prononce ?) figurera dans l’expo collective et art-en-margesque Corps accords en compagnie, entre autres, de Marilena Pelosi.
Marilena Pelosi
Ce sera (Inch’allah !) du 12 septembre au 15 novembre 2008. Hoparavant, l’industrieux Centre de recherche et de diffusion de la Rue Haute butinera encore 3 outsiders dont Carol Bailly en juin-juillet 2008. L’expo s’appellera Overvloed/Foisonnements. Vous en saurez plus le moment venu ou tout de suite en allant sur le site d’AEM.
Bon j’en passe pour nous rapprocher vite fait de nos jours tranquilles. A Bruxelles toujours mais conçue par Lucienne Peiry et Anic Zanzi, dirlo et conservatrice de la Collec de l’Art brut à Lausanne, «une exposition à découvrir en famille» ou si ce mot vous rappelle trop Sheila et les petits soucis quotidiens: «Een tentoonstelling om te ondekken met hele gezin», ça vous a une autre gueule en néerlandais!
Ted Gordon
Attention, ça viendra vite ces Bestioles d’art brut et d’art en marge car le vernissage c’est déjà le 6 mars 2008. La porte à côté. Ceux qui suivent un peu l’actualité brute se doutent déjà qu’il s’agit d’un bestiaire qu’on les invite à visiter : «kom en ontdek het grote dierenboek -soms vreeemd, soms grappig- van de Art brut». C’est-à-dire «-un bestiaire, étrange ou espiègle-».
Gaston Duf
Etrange, d’accord mais, j’ai beau aimer Till, «espiègle» m’en bouche un coin.
Espiègles les rhino féroces de Gaston Duf ?
Espiègles les félins/fêlés de Ted Gordon ?
«Espiègle» est cool, «espiègle» ne fait pas peur aux foules, «espiègle» est recommandé pour les petits n’enfants de 7 à 77 ans.
«Espiègle» colle à l’art brut comme le tablier colle à la vache.
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02.01.2008
Que ferez vous en novembre ?
Et c’est reparti comme en 14. Voilà déjà du nouveau qui s’avance (veau qui s’avance, veau qui s’avance) pour 2008. Prenons les choses par la fin.
Du 21 novembre 2008 au 28 juin 2009, les œuvres bouleversantes de Lubos Plny seront montrées, en compagnie de celles d’Anna Zemankova, à la galerie abcd of Montreuil, si d’ici là les petits cochons ne la mangent pas.
Novembre, c’est loin mais débrouillez-vous pour pas oublier, mon petit doigt me dit que ça va être d’enfer.
Les dessins de ce Tchèque au nom imprononçable sont le prolongement d’une sorte de body art qui l’a conduit à soumettre sa personne à des expériences et des traitements très personnels.
Fasciné par les fluides corporels, il intègre tout naturellement dans ses dessins anatomiques et endoscopiques de la charpie colorée de sang ou de liqueurs pharmaceutiques. C’est cruel et beau comme un cœur ouvert, terrible et sublime comme une âme mise à nu par son scalpel même. On se sent pousser des griffes à regarder ça.
A propos de Plny, les petits Animuliens qui n’ont pas froid aux œils, trouveront une notice détaillée sur le site d’abcd et une autre plus rapide dans le n°1 de son journal intitulé Le chant des sirènes, l’automatisme dans l’art brut.
J’emprunte une partie de la sienne à la Cavin Morris Gallery de New York pour vous donner envie d’aller voir le reste et les deux impressionnantes reproductions qui l’accompagnent : «Plny audited several anatomy classes, and studied grave digging. His drawings, highly anatomized self portraits, contain careful notes about the presence or absence of bodily fluids.»
20:00 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, Lubos Plny, abcd | | Imprimer | | |
26.12.2007
Des fantômes et des anges au Grand-Hornu
Je comptais m’en tenir là, concernant celle du MAC’s au Grand-Hornu en Belgique (jusqu’au 13 janvier 2008), tant il est vrai qu’un meeting avec Mac Collum, Aloïse, Buren, Madge Gill, Robert Barry et Henry Darger, c’est kif-kif pour moi la rencontre «sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie».
Cependant le catalogue évoque le temple d’Hadrien (son cabinet logologique à lui) alors je me sens concernée par cette confrontation d’«extraits des collections du Musée d’Art Moderne Lille Métropole».
Le problème du MAM, c’est pas qu’il soit actuellement fermé pour modernisation, c’est qu’il est trop riche. C’est un berger qui veille sur un cheptel bigarré. D’un côté les brebis de l’art moderne et contemporain, de l’autre ce loup dans la bergerie : l’art brut.
Comment rassembler ce troupeau sans limer les dents d’Ysengrin, sans affubler les agneaux de crocs? Problème pas simple.
Des L’Aracine et des ailes, pardon, je voulais dire : Des fantômes et des anges -le vrai titre de l’expo du Grand-Hornu- se donne un mal de chien pour le résoudre.
Sans faire la bête, j’avoue que je suis pas baba devant la juxtaposition d’une Femme lipue de Van Dongen, datant pourtant d’un temps où l’artiste n’était pas encore un portraitiste people, avec un St Adolf de Wölfli, au prétexte formel de la coïncidence d’un œil charbonneux et d’un masque noir du style «loup».
Boules de gomme d’un côté, mystère de l’autre.
Moule à gaufres
Les rédacteurs du catalogue ont beau s’y mettre à 5, on peine à saisir le concept de l’expo, surtout si comme moi on a le ciboulot trop moulagaufre pour cerner les «points hypnogènes et psychicônes» dont nous entretient Nicolas Surlapierre page 34.
«Comment mettre en place (…) un dispositif où le regard peut s’accrocher de la même manière, à ceci, à cela et encore à cela -art brut, art moderne, art contemporain- (…) ?» demande, page 114, Laurent Busine.
On peut pas. Sauf au moyen de tours de passe-passe.
«Cette (…) ascension spirituelle est peut-être (C moi qui souligne) à rapprocher des recherches contemporaines d’Augustin Lesage» nous dit, p. 44, Savine Faupin qui vient de parler des «Peintures de rêves» de Miró.
«Pourquoi est-ce que je regarde ce jeune homme de Modigliani aussi bien (C moi qui…) que cette femme colorée d’Aloïse ?», tente de nous persuader Laurent Busine p. 70.
Avec des «aussi bien» et des «peut-être», on mettrait Paris en bouteille et l’art brut au placard. Car il deviendrait encombrant, l’animal !
Raison pour laquelle peut-être, le directeur du MAC’s qui a pourtant dû potasser Dubuffet et Thévoz, soutient que «le statut» de l’art brut «n’est toujours pas défini de manière précise».
Comme dirait Scully «la vérité est ailleurs».
Elle perce dans le texte de Jérôme André, le dernier du catalogue fantômique et angélique.
«A la lumière du musée, l’objet est (…) naturalisé en œuvre d’art» remarque-t-il p. 162.
De «naturalisation» à «artification», son vilain petit avatar, il n’y a qu’un pas.
Le pas de ceux qui s’étonnent toujours que Dubuffet les ait dépossédés à jamais de leur monopole d’instances légitimantes.
Le pas de ceux qui admettent mal qu’un créateur puisse ne s’autoriser que de lui-même.
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16.12.2007
L'art brut saisi par l'esthétique
C’est comme dans la chanson de Berthe Sylva, on devrait m’appeler «la dénicheuse». Je débusque les revues confidentielles, plus camouflées que des oisillons dans une haie.
Cette fois, c’est une savante publication que je ramène dans ma gibecière de braconnière de chez Tati (pas le cinéaste dont je salue le centenaire).
Recherches en Esthétique - c’est son nom - est l’organe du C.E.R.E.A.P. Ce que signifie ce sigle, j’en sais que couic. Ce que je peux vous dire c’est que REE est publiée avé des concours martiniquais et guadeloupéen : IFUM et DRAC. Cela vous fait une belle jambe ? D’ac mais le truc c’est que le n°13 de Recherches en Esthétique est placé sous l’enseigne de La Relation au lieu, ce qui nous vaut deux papiers sur des créateurs d’art brut.
L’un hyper-connu : Arthur Bispo do Rosario et l’autre pas étranger aux Animuliens : Adrien Martias.
Les articles en français sur Bispo sont trop peu nombreux pour que je signale pas celui de Anne Dallier-Popper bien qu’il soit pas illustré. Il s’intitule : A l’écart de la vie et du monde de l’art : A.B. do R. Ce titre reprend celui d’une expo de 1982 organisée à Rio de Janeiro, par le critique brésilien Frederico Morais : A Margem da vida.
Disons, pour simplifier, que l’article de Mme Popper s’emploie à mettre en évidence les motivations différentes qui singularisent les œuvres de Bispo (accumulations, installations ou «psycho-objets», étendards, vêtements) lorsqu’on les compare à celles des courants artistiques contemporains dont on les rapproche souvent : duchampisme, Nouveau-Réalisme, Arte Povera.
Adrien Martias, pour sa part, fait l’objet d’un traitement attentif par Béatrice Steiner. Celle-ci, sous le titre un peu chinois de La Grande muraille d’Adrien Martias y développe la notice dont elle nous avait offert la primeur le 9 février 2007.
Faute de données biographiques bien certaines, B.S. est amenée à se poser des questions, sur l’ancrage de Martias dans «les mythes de sa culture», voire dans le «culte Vaudou». Plus décisives me paraissent ses envolées sur le thème de l’enfermement : «L’enfermement met en scène un fantasme très archaïque, celui d’un risque de fusion avec un corps Autre. Menace immatérielle réveillant la crainte, bien réelle, d’un magma engluant, semblable à ce que l’on ressent dans les cauchemars.» Bien jeté, non ?
Aussi bien que Mme Popper qui nous dit que le «travail acharné» de Bispo «peut se définir comme une sorte de reconstruction de la vie dont il est éloigné, voire (…) un sanctuaire de vie à préserver».
Arthur Bispo do Rosario statufié dans sa région
Bravo les filles ! Ceux et celles que branchent cette popperisation et/ou steinerisation feront bien de noter que Recherches en Esthétique est diffusée par Jean-Michel Place et qu’on la trouverait chez Tschann à Paris, chez A Plus d’un titre à Lyon, chez Le Chercheur d’art à Rennes.
Ciao, ciao !
01:05 Publié dans Ecrits, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, arthur bispo do rosario, adrien martias | | Imprimer | | |
13.12.2007
Pierre Honoré, artiste-paysan
Pierre Honoré. Avec un pareil nom, allez donc chercher sur l’ami Gougueule ! Il vous en sert des tonnes avec généalogies en pagaille. Et quand ce patronyme est suivi de la mention «artiste-paysan», c’est pas mieux. Comment ? Un sculpteur autodidacte dans le bocage ?
On a beau savoir que la Mayenne cultive l’anticonformisme, on soupçonnerait presque une supercherie.
Pourtant, il faut se rendre à l’évidence, de très sérieuses institutions comme le conseil de la Mayenne (grade : général), mademoiselle l’Europe et le C.C.V. (Communauté de Communes de Villaines-la-Juhel) ont uni leurs efforts pour que naisse aux Editions Siloé, une maison créée à Laval en 1982, un bouquin blanc comme un morceau de sucre dont l’auteur est un certain Jacques Dubois (pas pratique non plus les investigations gougeuliennes avec un blaze si françois) et le photographe Bertrand Bouflet qui a travaillé (tiens, tiens…) avec le sculpteur Louis Derbré, bien connu à Ernée et dans le monde entier. Le bouquin s’intitule, vous avez compris, fines mouches animuliennes, Pierre Honoré, artiste-paysan et ça vient de sortir en novembre 2007.
Cela fait des dizaines d’années que Pierre Honoré sculpte et modèle son domaine «oriental» et sa maison situés dans le creux d’un vallon dominé par le mont des Avaloirs aux confins de la Mayenne et de l’Orne. Et on ne le savait pas. Son œuvre, constituée de statues en grès ou en granit, de pièces en bois de madriers, de mosaïques à belles alanguies accuse un fort (trop fort parfois) penchant pour les divinités khmères.
C’est que son goût de la lecture l’a entrainé, lui qui, à 13 ans, a dit bye bye à l’école, vers les récits d’explorations, le journal L’Illustration et les images de l’ex-colonisation. Il s’égare parfois dans des Egyptomanies assez fades puis se reprend de belle façon dans des bustes et des têtes que l’on dirait du meilleur style «grotesque» façon 18e siècle. Il ferait presque penser alors à une espèce de Barbu Müller par sa capacité à s’accommoder de l’ingratitude du matériau.
Ce qui le sauve, c’est les grosses poitrines de ses femmes sculptées manifestant un tranquille érotisme. Je sais pas si le papier couché de l’édition y est pour quelque chose mais la repro des photos est pas formidable et même carrément sombre sur celle offrant le portrait du créateur sous un grand chapeau de paille qui lui mange la figure. On se prend à se demander (tiens, tiens …) si c’est pas fait exprès. La crainte d’une mise en scène nous effleure à nouveau mais il y les logos de l’Europe, du C.G., du C.C.V. etc. Pour vous faire votre idée, HT le livre et consultez la plaquette Prisme.
Dans les temps (juin-août 1997, le n°13 de la Revue Maine Découvertes a parlé aussi de Pierre Honoré, Le paysan orientaliste, né en 1925, qui a conservé tout ce qu’il a fait depuis qu’il s’est mis à l’art dans les années 50 du siècle 20. Ancien conseiller municipal, il a créé une asso d’artistes amateurs : le Club des Artistes de l’Ouest.
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09.12.2007
Art en marge reçoit Richard Greaves
Flotte, flotte, flotte et reflotte. Vous pensez qu’avec un temps pareil votre PAM (petite ame errante) est restée devant son Lady Grey ?
Et bien non. Prête à se mouiller pour aller chercher l’information, elle n’a pas hésité, droite dans ses bottes lacées, à affronter les pavés glissants de la capitale belge.
C’est que l’événement vendredi soir était rue Haute, au 312, puisque la tournée européenne de Richard Greaves y faisait escale chez Art en Marge pour y mouiller jusqu’au 16 février.
Bruxelles est une ville formidable où l’influence de la Sécession viennoise se fait sentir, pas seulement dans les expos du Musée d’Architecture / Museum voor Architectur et ce que j’ai admiré d’abord en arrivant dans la galerie AEM, c’est les jeux de damiers sur le sol.
Faut dire que c’est pile poil ce qu’il faut pour une expo de photos, ça fait penser à de la pelloche perforée sur les bords. Au lieu de nous faire lécher des murs blancs en suivant un morne défilé d’images posées les unes à côté des autres, l’accrochage a privilégié le léger, le mouvant, le labyrinthique, le bifaçadisme. De simples câbles d’acier tombés du plafond supportent des panneaux dont les photos de Mario del Curto occupent recto et verso.
Le visiteur peut ainsi circuler au milieu de ces captivantes images, passer d’un gros plan à une vue d’ensemble, apercevoir les yeux de Richard Greaves (ou tout autre détail) qui se profile dans les entre deux.
Les légers chocs (inévitables les soirs de vernissage) qu’il leur imprime au passage les fait osciller comme sous l’effet d’une brise. Tout est fait pour offrir une transposition abstraite des impressions que l’on éprouve réellement lorsqu’on se promène sur le territoire de Greaves, dans cette Beauce à cent mille lieux du Jeu de Balle.
En sourdine, sous la rumeur des langues qui vont de bon cœur, des bruits de la forêt québécoise viennent accentuer subtilement cette transposition.
Le vent qui souffle à nos oreilles semble provenir des photos de MDC qui possèdent leur respiration propre, large, profonde et sereine.
Quand on sort de là-dedans, on est mûre pour tremper son manteau à fronces de cuir et col emmitouflant acheté à New York dans la tempête qui secoue l’Europe.
Rien ne pourrait nous empêcher de prendre à travers les vitrines quelques clichés d’ambiance artenmargesque pour tous les Animuliens, muliennes resté(e)s au chaud dans leurs sweet homes. Avant de filer au CIVA, 55 rue de l’Ermitage (à une encablure du Musée d’Architecture) où R.G. (non, pas Hergé !) a tissé, sur une terrasse plantée d’un mini-bois, une nouvelle toile. Sont venus s’y prendre des tas de vieux jouets colorés, ce qui va plaire à vos enfants quand vous les emmènerez voir ça. Et à moi si j’ai le temps de revenir car mon Thalys, hélas, m’attendait déjà à la Gare du Midi.
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28.11.2007
« L’art brut … enfant gâté de la saison »
Difficile d’en savoir plus sur le peintre Pierre Giraud dont je vous ai parlé le 15 mars dernier dans ma note : Un enchanteur limousin… On croirait le furet, le furet de la chanson : «Il est passé par ici, il repassera pas là».
Par ici, cette fois c’est Sotheby’s of Paris et en vous remuant fissa vous aurez peut-être la chance d’apercevoir ou même d’acheter le joli petit lot 160 de la vente de livre et de manuscrits de demain jeudi 29 novembre 2007 en la Galerie Charpentier, rue du Faubourg St-Honoré, au 76. C’est une double page d’écolier à l’encre violette, une lettre de Chaissac Gaston, pas datée mais adressée, devinez à qui, à Pierre Giraud badame ! «enchanteur en cave à Limoges». Reportez-vous au catalogue de la vente pour looker les deux dessins du Gastounet qui agrémentent la missive : un escargot, un serpent, du genre allusif.
Sotheby’s leur a préféré un Petit Prince de l’aviateur (St-Ex), plus commercial, pour la première de couv.
Je vous reproduis quand même cet enrhumé chronique et son cache-nez, rien que pour que vous n’ayez pas trop à chercher le dit-catalogue.
Celui ou celle qui a rédigé la notice de la lettre est bien sympa. Il nous en recopie un beau morceau et en plus, avec une loupe, on arrive à en lire plus sur la reproduction. Je choisis là-dedans ce morceau de grand frère où Chaissac a l’air d’engueuler Pierre Giraud : «On ne peut atteindre à la maîtrise sans avoir été apprentis et compagnon. Je vous vois en bonne voie pour devenir un jour un vieux Monsieur démodé et ridicule et je prends mon courage à deux mains pour vous crier casse-cou».
Auparavant, il mettait P.G. en garde contre certaines facilités attachées à de commodes prétextes : «L’art brut tout enfant gâté de la saison qu’il est ne saurait indéfiniment emplir votre vie et faire résonner votre renommée et vous aurez beau garnir de moignons vos toiles c’est pas ça qui vous fera mériter de la patrie».
Je n’ai pas trouvé trace de cette lettre dans le volume Hippobosque au bocage mais vous pensez bien que je n’ai pas pu fouiller dans toute la correspondance publiée de Gaston Chaissac. Peut-être quelqu’un saura ? Chaissac quitte son poteau Giraud en lui « laissant deviner si tout cela est une boutade ou pas une boutade ». Pour ma part, j’emprunte ma conclusion à un dessin de Pierre Giraud.
23:55 Publié dans Ecrits, Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Pierre Giraud, Gaston Chaissac, art brut | | Imprimer | | |
25.11.2007
Plancher de Jeannot : Chronique d’une capture
«Le computer ça peut tout faire» comme dit Bill Murray dans le dernier film de Jim Jarmusch, Broken Flowers.
Hormis trouver un autobus pour aller au Quartier Latin. Et comme j’avais la cosse de tricoter des gambettes, j’ai attendu la suspension (provisoire ?) de la grève cuvée Beaujolais 2007 pour me procurer le n°71 de la revue Cassandre à L’Ecume des Pages, 174 boulevard Saint-Germain.
Sous une couverture feu et une citation de Gramsci, Cassandre dont vous m’aviez signalé l’existence, chers Animulien(ne)s (cf. vos commentaires à ma note Exposition réquisitoire du 20 sept. 2007) est une vitrine de «l’art principe actif» illustrée en noir et blanc. Mais attention, rien qu’avec des clichés hyper-class et avec une mise en page et une typo qui jouent la lisibilité plutôt que les effets olé-olé!
C’est une photo de la série photographique de Martin d’Orgeval qui accompagne l’article de Céline Delavaux consacré au plancher de Jeannot.
Réquisitoire - Photo Martin d'Orgeval
Chronique d’une capture -c’est le titre de l’article- annonce la couleur dès son chapô.
Cette «pièce majeure, la plus tragique et la plus émouvante» de l’Exposition Ecriture en délire de 2004 à la Collection de l’art brut de Lausanne «se trouve aujourd’hui morcelée, encastrée dans des panneaux d’acier installés sur le trottoir devant l’hôpital Sainte-Anne à Paris. Un parcours qui soulève d’inquiétantes questions». Les intertitres de ce papier de 2 pages (78 et 79) sur 2 colonnes relancent sans polémique inutile la réflexion du lecteur : Objet de fait divers et œuvre d’art, Le symptôme du mécénat.
Bien documentée, la rédactrice, au lieu d’en rester aux habituels constats anodins, ne s’interdit pas les «naïves questions». Par exemple : «le docteur Roux analyse le «cas Jeannot» avec une application scolaire, mais ne dit rien des motivations qui l’ont conduit à vendre l’objet à une entreprise de médicaments… S’il considérait ce plancher gravé comme «une œuvre singulière» comme il le dit, pourquoi ne pas avoir favorisé son exposition en le cédant à une structure adéquate muséale ou non?».
Céline Delavaux décortique le processus de légitimitation qui transforme en œuvre «un objet unique, réalisé par un jeune inconnu défunt (…)» pour le présenter ensuite «comme un symptôme dans un lieu d’exposition acquis».
Bon résumé comme ça, je vois bien que vous restez sur votre faim, alors crachez vite vos 8€ pour vous offrir Cassandre sur un plateau de petit-déj.
Musée des ostensions - Esse (Charente limousine)
Chronique d’une capture, c’est idéal pour commencer la journée. C’est du bon travail de journaliste. De journaliste moderne qui n’a pas peur de citer les blogues. C’est encore assez rare pour que votre petite âme errante le signale à grands renforts de porte-voix.
19:10 Publié dans Ecrits, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, Plancher de Jeannot | | Imprimer | | |
04.11.2007
Calaveras rue des Cascades
Martin Ramirez par Mary Altaffer/AP Photo
J’étais partie pour vous parler de cette nouvelle qui doit mettre en ébullition tous les collectionneurs d’art brut : on vient de retrouver un paquet de dessins inconnus de Martin Ramirez, quand la rue des Cascades s’est jetée en travers de ma route.
Gravure par Kristin Meller
En cette fin de journée à lumière parisienne propice je me dirigeais, bras dessus bras dessous avec mon petit kodak, en direction d’une galerie du 20e arrondissement où Le jour des mort au Mexique était évoqué par un autel à offrandes et par des calaveras dans l’atelier de l’Association pour l’estampe et l’art populaire.
La rue des Cascades est une drôle de voie serpentine ainsi nommée -j’imagine- parce qu’on y captait des sources et qu’on y croise encore des «regards», édifiés pour surveiller icelles.
J’allais atteindre le 49 bis où ce que crèche l’asso en question lorsque, non loin de la maison utilisée par Jacques Becker comme décor pour son Casque d’Or, je suis tombée sur une cascade de graffiti sculptés comme on n’en fait plus.
C’est à l’exact coin de la dégringolante rue des Savies et de sa cascadeuse voisine. Un morceau aux allures furieusement provinciales qui fait tout son possible pour oublier les rénovations à prétentions modérées ambiantes sans pour autant tomber dans le musée à touristes.
Vous mordez le truc ? Là, sur un mur de jardin de curé couronné de plantes mal peignées, comme une page de croquis griffonnés sans fignolage, de drôles de têtes se bousculent, pas de la même main on dirait.
La proximité d’un Espace Louise Michel (où les glandeurs du dimanche étaient invités, par voie d’ affichette rétro, à une expo sur L’Espagne et ses républicains pour témoins) explique sans doute qu’à des têtes de mort, l’un des sculpteurs anonymes du mur des Cascades ait cru bon d’ajouter des messages adaptés à l’histoire du quartier :
«Anarchie»,
«Vive la Commune»
Une rapide enquête de votre petite âme errante lui a permis de savoir que cette œuvre lapidaire, urbaine en diable, avait été attribuée à un «artiste-ouvrier» qui a nié en être l’auteur.
C’est vrai, qu’à côté de figurations sauvages, on croit discerner dans ces graffiti une certaine élégance de trait qui pourrait être la marque d’un artiste pure laine.
Un gus en tous cas qui serait au parfum de Brassaï et qui n’aurait pas craint, à cause de ça, de recourir au grattage, une technique plutôt négligée en nos jolis temps pressés comme lavement.
C’est en songeant à tout ça, qu’au bout de la rue des Cascades, j’ai rencontré, près d’un kébab, la Sirène de Ménilmontant .
23:55 Publié dans Expos, Images, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : calaveras, graffiti, martin ramirez, art brut | | Imprimer | | |
17.10.2007
Le Décimo nouveau est arrivé
Alerte rouge sur le front de l’art brut. Le Décimo nouveau vient de sortir. Votre petite âme errante vous avait déjà signalé fin 2006 l’imminence de ce bouquin intitulé Les Jardins de l’art brut.
C’te fois-ci, il est signalé en chair et en os (c’est à dire en 288 pages et en 270 zimages couleurs et N/B, sous reliure s.v.p.) chez son éditeur, Les Presses du Réel.
Comme L.P.R. précise qu’il s’agit d’une «édition française», je me demande s’il y a de la version in english sous roche. On verra bien.
En attendant achetons les yeux fermés cet «essai sur la naissance et le devenir de l’art brut» assorti d’un parcours imagé hors les musées donc plus près des muses.
Faire confiance à priori à Marc Décimo, au nom prédestiné puisque lingouiste et sémiotichien autant qu’historien (histo-bien aussi), ne me paraît pas chose impossible.
Le monsieur a fait ses preuves dans le délicat domaine des «fous littéraires».
Trouver la thune (26 €) pour mettre sur vos rayons de petits butineurs et/ou petites abeilles intellos ce livre, où il est, paraît-il, beaucoup question de la bisbille entre le Raymond (Queneau) et Dédé des Amourettes, ça ne devrait pas être trop sorcier, j’espère.
De toutes façons, vous avez quelques jours devant vous pour taper votre mamie ou votre daddy, le temps qu’il faudra pour qu’il apparaisse sur les gondoles des supermarchés du papier.
22:45 Publié dans Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : marc décimo, art brut | | Imprimer | | |